TEMPS DE CHIEN Extrait

TEMPS DE CHIEN roman actuellement en vente d’Alix Roche-Moulin.

Extrait

Helena est devenue son rayon de soleil. Peut-être a-t-elle vraiment de l’estime pour lui ou ce qu’il a été… Ou sait-elle s’y prendre assez bien pour qu’il soit persuadé d’être son patient préféré ?

— Comment allez-vous Valentin ? Etes-vous un petit peu heureux ?

— Il m’arrive de rêver que j’ai vieilli subitement, et lorsque je me réveille en sursaut, je découvre que ça n’est pas un simple cauchemar mais la réalité. C’est une sensation effroyable. Pourquoi est-ce que je ne me suicide pas ? Manquerais-je à ce point d’esprit pratique ?

— Vous ne vous donnerez pas la mort, Valentin, parce que vous êtes un battant.

— A quoi bon m’acharner puisque je suis vaincu. J’ai beau être fou, je ne puis aimer la vie à ce point-là. Même un lâche dans ma situation retrouverait du courage.

— La partie n’est pas encore perdue et vous le savez.

— Allons donc, je dois être économe de mes forces. Sans cesse, la vie quotidienne m’impose des choix lorsque, avant, je pouvais tout avoir. Et c’est précisément ce que je voulais : tout.

— Choisir entre des actes pourtant anodins, se ménager, c’est ce que la plupart des hommes doivent faire leur vie durant. Votre vitalité exceptionnelle vous avait mis à l’abri de ces contrariétés jusqu’alors.

— Ce n’était pas que ma vitalité, docteur. Je suis un être susceptible qui ne supporte pas d’être contrarié.

Le ton est goguenard. Le joli sourire du médecin vient récompenser la plaisanterie. Helena aime que Valentin l’amuse et ça déborde peut-être du cadre de la thérapie. Le doux sourire d’Helena, c’est à peu près le seul bonheur de Valentin. Le reste de son existence, il le passe claquemuré chez lui à éviter le geste de trop qui l’amène au bord de l’épuisement. Une loque.