ENTRETIEN AVEC ALIX ROCHE-MOULIN PAR ERIC K. (8) A propos de ZONE 51

-          D’abord cette question, si tu le permets mon cher Alix, la date de parution de ton recueil de nouvelles, LA PROXIMITE DES ABIMES, est-elle déjà fixée ?

-          Non, la situation qu’elle soit sanitaire ou économique continue d’être confuse et retarde cette parution. En ce qui me concerne, je n’y vois aucune urgence. Ce recueil paraitra lorsqu’il le devra.

-          Par surcroît, tes textes ne risquent pas d’être démodés de sitôt…

-          Tu veux dire, cher Éric, que ma vision de l’avenir n’étant guère optimiste je n’ai guère de chances de me tromper !

-          C’est à peu près ça ! Evoquons la nouvelle ZONE 51, à présent.

-          ZONE 51, c’est peut-être demain, mais c’est à coup sûr aujourd’hui et hier… On en sort pas, réfléchir à l’avenir, c’est prendre conscience du présent.

-          Tu n’adhères pas à cette idée qu’essayer de penser un texte futuriste, ça n’est jamais que s’appesantir sur le passé et que l’avenir ne saurait se concevoir…

-           Bien sûr que non, c’est là une vision des choses beaucoup trop courte. Il ne s’agit pas, je te le répète une fois de plus, de jouer les cartomanciennes, mais de se livrer à des déductions évidentes, raisonnables qui nécessitent, et c’est ce qui gêne, un certain courage.

-          Dans ZONE 51 tu reprends un thème qui semble te tenir particulièrement à cœur : celui de la guérilla urbaine.

-          Réfléchir à notre époque c’est penser forcément à la guerre civile. Cet ordre républicain auquel se rattachent les dominants n’est en fait plus qu’un leurre. Le pouvoir politique a pour principale raison d’être d’empêcher le chaos de l’anarchie. S’il n’y parvient pas, il perd alors toute légitimité.

-          Le pouvoir politique voit souvent la situation lui échapper, en effet. D’où, à certaines occasions, sa grande violence à l’égard des fauteurs de troubles… 

-          On cherche à donner le change. Les politiciens veulent encore se croire les maîtres même si le pouvoir réel ne leur appartient plus. Il est passé aux mains des banquiers et des multinationales… Parfois même, c’est la rue qui commande…

-          Ta ZONE 51 n’est pas celle qui recueille la technologie alien. Dans ta nouvelle, elle est ainsi surnommée par ironie.

-          Il s’agit d’un lieu de liberté dans un monde qui étouffe sous une surabondance de lois idiotes, autrement dit une zone de non-droit.

-          Nous reviendrons plus longuement, Alix, sur cette intéressante nouvelle. Résumons rapidement… Pour tes personnages, il s’agit d’un couple de jeunes gens que le danger a réuni, l’espoir ne consiste plus à intégrer la société mais à la fuir.

-          Dans cet avenir proche que je décris, les deux choses paraissent aussi difficiles et le choix cornélien !

-          Tu ne songes jamais à une amélioration possible de la société occidentale, une amélioration qui te surprendrait ?

-          Cher Éric, je ne demande pas mieux que d’être surpris. Mais nos choix, en ce qui concerne le futur ont déjà été effectués, je le crains. Gavé de distractions, de biens de consommation plus ou moins inutiles, le peuple a renoncé à son emprise sur les évènements durant les dernières décennies. Mais nous reparlerons un peu plus tard de ZONE 51…

TEMPS DE CHIEN, roman actuellement en vente d’Alix Roche-Moulin