TEMPS DE CHIEN Extrait

TEMPS DE CHIEN, roman actuellement en vente d’Alix Roche-Moulin.

Alexandra n’a pas son sourire habituel. Ce sourire très spécial qu’elle lui destine depuis un certain entretien qui a suivi cette réunion d’un ennui mortel. Ce petit plus. Cette étincelle. Ce désir qui subsiste sans qu’elle n’en ait peut-être pas conscience. Mais est-elle si naïve ?

— Asseyez-vous, Valentin.

En fait, Valentin s’est assis avant qu’on ne le lui propose. Dans ce service dont il est officiellement le numéro deux, il se sent comme chez lui. Un numéro un bis. Un rouage tout aussi indispensable qu’Alexandra peut l’être.

— J’aurais bientôt bouclé le dossier Brayer, annonce-t-il crânement.

Et pourquoi pas ? Ce boulot est l’un des plus délicats qui soit. Valentin ne rate pas une seule occasion de rappeler l’importance de son rôle au sein de l’entreprise. Pas tellement pour se vanter, ce n’est guère dans sa nature, mais parce qu’on est jamais trop prudent et qu’il est un homme habile.

Or, voilà que ça se gâte.

— Vos récents problèmes de santé nous ont conduits à prendre une décision difficile…

Valentin sent son cœur s’arrêter de battre. Il voudrait rester impassible mais sans doute prend-il un air stupéfait. Il n’arrive pas à comprendre comment la nouvelle a pu s’ébruiter. Il a tant fait attention à ne rien laisser paraître. Son teint brouillé ?... Bagatelle ! Les suites d’une banale intoxication alimentaire, affirmait-il. Qui donc alors s’est permis de le dénoncer ? Evidemment personne sinon le traître de service : Marc-Antoine. Le seul au courant. Ce salaud. Cette misérable larve…

— Nous ne pouvons plus vous garder dans l’entreprise. Votre renvoi a un effet immédiat.

Alexandra n’ajoute même pas « désolée ». Rien dans son attitude n’exprime le regret. Plutôt l’ennui qu’engendre une besogne ingrate. Alexandra n’est en rien concernée. Valentin a le sentiment qu’elle se venge, sans qu’elle sache très bien de quoi.

Extrait.